Espace rural
Rural : « qui relève de la
campagne » (Les mots de la géographie) ; l’espace rural est donc
l’espace de la campagne. Si le mot rural apparaît dès le XIV° siècle et
s’il a été très employé, à partir du XIX° siècle par les spécialistes
qui se sont intéressés à la campagne (habitat rural, paysage rural,
histoire rurale, ethnologie rurale, géographie rurale, etc.),
l’expression espace rural n’est devenue courante qu’à partir des années
1960, le mot campagne (ou campagnes) lui ayant été préféré jusqu’alors
pour désigner le « territoire » concerné.
La
notion est floue : « la campagne s’oppose à la ville » nous dit le
Dictionnaire de la géographie de P.George. Soit, mais comme on définit
toujours d’abord la ville, la campagne se définit par défaut : c’est ce
qui reste quand on en a soustrait l’espace urbain. Or, comme la
définition de la ville elle-même varie beaucoup d’un pays à l’autre, et
parfois d’une administration à l’autre, celle de la campagne est
également à géométrie variable. En France par exemple, appartiennent à
la campagne les communes de moins de 2 000 habitants agglomérés, sauf si
elles sont rattachées à une unité urbaine. Ailleurs, la limite
supérieure admise pour que la population d’une commune reste rurale
oscille généralement entre 1 000 et 10 000, mais elle peut s’abaisser à
200 (Scandinavie) ou, au contraire monter à 20 000 ou même 50 000
(Japon). Certains pays ajoutent à ce critère de population totale, une
densité maximale, un pourcentage minimum d’agriculteurs, etc. ; d’autres
définissent même la ville sur de stricts critères administratifs.
La
question se complique encore, du moins dans les pays occidentaux, avec
l’homogénéisation des territoires qui tend à faire disparaître
l’opposition classique ville/campagne. L’extension des espaces
périurbains, à la fois urbains par leur fonctionnement (les emplois se
situent dans les agglomérations) et ruraux par leur « paysage »
(maison individuelle, paysages encore majoritairement végétaux) est la
face la plus spectaculaire de cette homogénéisation. Mais, même hors des
campagnes périurbaines, les ruraux tendent à occuper peu à peu les
mêmes types d’emplois, à s’insérer dans les mêmes catégories
professionnelles et à adopter les mêmes styles de comportements, de
références et de représentations que les citadins. La question n’est
d’ailleurs pas nouvelle puisque, dès 1959 Mendras affirme : « pas de
solution de continuité entre la métropole, la grande ville, la petite
ville, le bourg et le village », donc pas d’espace spécifiquement rural …
Dans ces conditions on peut se demander si la notion d’espace rural a
encore un sens. Oui, à condition d’en donner une définition soit
qualitative, soit quantitative mais relative.
Une définition qualitative peut
s’appuyer sur trois critères essentiels. Premier critère, la densité :
faible densité relative non seulement d’habitants, mais également de
constructions, d’emplois, d’équipements, de commerces, de services, de
voies de communications et, plus généralement d’interconnections.
Second critère, le paysage : est rural un espace qui se caractérise par
la prédominance de formations végétales dites « naturelles » (en
réalité souvent fortement transformées par les sociétés humaines) :
forêts, prairies, pacages, cultures, friches, steppe, désert, etc.
Troisième critère, est rural un espace où les activités agricoles
tiennent une place relativement importante, sinon en terme d’emploi, du
moins par les surfaces qu’elles occupent.
Il n’est pas possible de donner de
l’espace rural une définition quantitative universelle, on l’a vu plus
haut. En revanche, il est concevable d’en donner une qui soit valable
hic et nunc, c’est-à-dire qui tienne compte de l’espace global dans
lequel il est inséré. En effet, l’espace rural chinois ne peut pas se
définir quantitativement de la même façon que l’espace rural français
(même si les critères qualitatifs peuvent s’appliquer aux deux
espaces), ne serait-ce que pour des différences de densité de
population évidentes. Toutefois, dans chacun de ces deux pays, il est
possible de définir, pour chacun des critères, des niveaux quantitatifs
(densité de population et de services, poids des agriculteurs,
pourcentage de couverture végétale) qui permettent de délimiter un
espace que l’on considèrera comme rural et que l’on étudiera comme tel,
à condition évidemment de ne pas le regarder comme un isolat, mais en
fonction de sa situation dans un « système spatial » global qui contribue à le structurer, à le faire fonctionner et à le changer.
L’intérêt pour l’espace rural, un
peu passé de mode avec l’apparition des « nouvelles » géographies,
reprend actuellement de la vigueur et ce, pour plusieurs raisons.
L’analyse des paysages « naturels » est redevenue d’actualité avec la
montée en puissance des préoccupations écologiques : considérés
désormais comme des patrimoines environnementaux, ils focalisent
l’intérêt des chercheurs sur la destruction du bocage, l’extension de
la friche, la fermeture des paysages, le maintien des zones humides, le
maintien de la biodiversité, et plus généralement la gestion des
ressources naturelles et des paysages. La transformation des
agriculteurs en prestataires de services, en jardiniers de la nature,
mais également en pollueurs potentiels, a ouvert de nouvelles pistes de
recherche. Celles –ci cherchent à mettre en évidence des relations
renouvelées entre agriculture et territoires ruraux autour des idées de
durabilité et de patrimoine. Par ailleurs, les changements opérés
depuis une quarantaine d’années dans la société rurale traditionnelle
notamment avec le « déversement » des citadins vers les campagnes
périurbaines, incitent les chercheurs à regarder vers ces espaces qui,
censés (à tort souvent) ne changer que lentement, se sont mis à muter
brusquement. Enfin, la dilution de la population, des équipements et
des activités liée à l’étalement urbain en fait un champ de recherche
privilégié pour certaines thématiques comme celle du poids de la « distance » sur les sociétés locales, l’avenir des espaces de faible « densité » ou à l’inverse l’émergence d’espaces
dits intermédiaires. Robert Chapuis
Bibliographie
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Chapuis R., 1998, La géographie agraire et la géographie rurale, in
Les concepts de la géographie, A. Bailly et al., Paris, A. Colin
[ندعوك للتسجيل في المنتدى أو التعريف بنفسك لمعاينة هذه الصورة] Mendras H. , 1959, Sociologie de la campagne française, Paris, PUF
[ندعوك للتسجيل في المنتدى أو التعريف بنفسك لمعاينة هذه الصورة] Thomas Ch., 1997, Rural geography, Routledge, Londres